For Mathilda (17)

Photo d’un immeuble en chantier dont je me suis inspiré pour planter mon cadre (source: google image)

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187. Ext. Jour. Le chantier au 36 East 12 street de Manhattan.

18h PM.
Un immeuble de bureaux se prépare à sortir de terre. Il ne postule pas à la catégorie des gratte-ciel avec ses quatre étages au compteur.
Deux grosses berlines cahotent sur le terrain du chantier, auréolées d’un grand nuage de terre. Elles s’arrêtent aux abords du bâtiment.
Des cerbères endimanchés dans un costume cravate sombre descendent des deux bagnoles. On en compte huit au total. Tous gardent une main enfouie sous leur veste, prompts à défourailler. Estevez et Harrisson mettent pied à terre à leur tour.

Mario les attendait. Il les surplombe, depuis le rez de chaussée surélevé.
L’immeuble, de forme ovale, se tient bien planté sur ses piliers de béton. Une forêt de barres d’acier enracinées dans les fondations, participe de l’armature générale. La tour, à l’état de squelette n’offre aucun rempart contre les éléments, la pluie, le vent et les balles.

Les tueurs forment une ligne de front face au bâtiment. Harrisson et Estevez en occupent le centre. Le premier se dissimule sous des lunettes noires quand le deuxième fume allégrement le cigare Quelques cinq mètres séparent les deux camps.

Une échelle monte du sous-sol caverneux jusqu’au premier niveau. L’utiliser impliquerait de tourner le dos à ses adversaires, alors Mario choisit plutôt de sauter. Un bond magistral et le voici sur le plancher des vaches.

Notre homme est vêtu d’un pantalon noire et d’une ample chemise immaculée. Ses lunettes sombres rappellent que le plus impitoyable ici est encore le soleil, surtout au crépuscule.

Mario
(en tapotant sa montre) Deux minutes de retard.
(sur un ton de déception) Harrisson, toi qui arrive toujours largement en avance! Surtout dans les entrepôts de came ! T’en laisses un peu pour tes collègues quand même ?

Harrisson se fend d’un sourire reptilien.

Estevez
(articulant avec le cigare dans la bouche) Où est la fille ?

Mario
(se caressant le menton)Trou de mémoire ! Pour que ça me revienne, ça vous reviendra à 100 000 en liquide.

Estevez
Alors t’as décidé de nous faire les poches! (agitant ses mains, d’un air d’incompréhension) Pourquoi? J’ai pas toujours été réglo avec toi? Je t’ai déjà refusé une p’tite avance quand t’étais dans la dèche? Gomez et moi on est un peu ta famille, ta seule famille.

188. Int. Jour. Voiture.
La Chevrolet est garée aux abords du chantier. A bord, avec un casque aux oreilles, Williams ne perd pas une miette de la conversation volée. Nous saisissons au vol la voix de Mario

189. Ext. Jour. Le chantier
L’heure est à la mise au point. Notre tueur déballe délicatement un chewing gum à la chlorophylle.

Mario
Ma seule famille? J’ai lu qu’il faut savoir tuer le père. Les 100 000 dollars iront pour ma psychanalyse.

Harrisson
(à Estevez)J’ai pas de temps à perdre avec ce branleur. On trouve la fille, on la bute et il paie l’addition.

190. Int. Jour. Voiture
Williams espionne la conversation. Les dernières paroles du lieutenant aux Stups lui font l’effet d’un direct au visage. C’est tout juste si son casque ne vole pas.

Williams
Nom de dieu !

191. Ext. Jour. Chantier
La tension monte, mais Mario avec son chewing gum dans la bouche reste stoïque

Mario
(sur un ton calme) Et mes 100 000 dollars?

Mal lui a pris d’avoir remis ça sur le tapis. D’avoir tous les regards braqués sur soi passe encore, mais tous les flingues! Et des flingues de concours! Harrisson a dégainé, imité dans l’instant par ses cerbères.

Estevez
(en ôtant son cigare)Tu comprends, Harrisson et moi, c’est un business qui roule. Alors comment te dire ? Tes 100 000 dollars, tu te les carres au cul !

Mario
Seulement les billets, où t’ajoutes la valise?

Harrisson s’avance vers Mario en le tenant en joue avec un Smith et Wesson.

Harrisson
(en beuglant) Lève tes mains, connard!

Mario obtempère. Le flic le palpe sans ménagement. Quelque chose l’intrigue au toucher.

Harrisson
(en passant une main sur sa poitrine)T’es blindé là dessous?

Sur un claquement de doigt, deux de ses toutous sortent des rangs.

Harrisson
Ouvrez-lui sa chemise !

Un sbire arrache les boutons d’un coup sec, dévoilant un gilet pare-balles. Et voilà notre officier des Stups pris d’un accès de stress.

Harrisson
(aboyant)Pourquoi t’as ce gilet?…Putain, c’est un piège ! Il avoir des micros sur lui! (en écrasant le canon de son arme sur son front)! Crève !

192. Ext. Jour. Chantier.
Un pan de la palissade entourant le terrain vole en éclats, pulvérisé au passage d’une voiture. Un gyrophare tonitruant vient ajouter à sa discrétion.

193. Ext. Jour. Chantier.
Cette irruption fracassante déconcentre Harrisson. Mario assène une manchette sur son bras armé. Un coup de feu part vers le sol. Dans le même élan, sa main droite bondit sur le Glock 23 que le garde sur sa droite avait remisé dans son holster. L’homme est désarmé sans avoir eu le temps de réagir. Mario le vise en pleine tête. Un lever de jambe et notre tueur attrape un couteau planqué à sa cheville. Le deuxième sbire dégaine, mais trop tard ! Le poignard se fiche au milieu de son front.

Harrisson s’est ressaisi. Il veut décharger son gun sur le tireur mais fait les frais de ses réflexes. Mario est en effet plus rapide et lui tire dans la main. Harrisson lâche son arme dans une grimace de douleur. Les six autres porte-flingues, dépassés par la confusion, déclenchent un feu nourri sur Mario. Des balles l’atteignent au niveau de la poitrine. Les impacts le projettent par terre. Le jeune homme roule sur deux mètres. Son corps tombe dans les fondations de l’immeuble dont seule émerge la partie supérieure.

Harrisson se tient la main droite. Un filet de sang coule entre ses doigts. Contre la douleur, quel meilleur anesthésiant que la rage?

Harrisson
(hurlant) Butez-moi ce fils de pute !

Cow boys de la DEA et spadassins d’Estevez s’élancent tout de go dans le sous-sol, baïonnette au canon. Ils sont encore six en course.

Pour toute cavalerie, une unique voiture, une Chevrolet noire déjà souillée de poussière. Celle-ci s’immobilise en travers du terrain. Williams tient en respect son homologue des Stups, flingue à l’appui.

Williams
(en tenant son Glock des deux mains) C’est fini, Harrisson !

Harrisson
Williams, vous braquez votre arme sur un agent fédéral! Rangez moi ça où vous allez au-devant de sacrés emmerdements !

Williams
Si quelqu’un ici va avoir une livraison d’emmerdes, c’est vous ! Tout est sur bande !

Harrisson
(moue méprisante) Des mots, c’est juste des mots! Vous croyez prouver quoi que ce soit avec ça ?

Williams
Ça va suffire à ouvrir une enquête. Vous êtes bon pour Rikers Island !

194. Int. Immeuble en construction. Au Sous-sol.
Tapi derrière un pilier, Mario a le souffle court. Il ouvre son gilet pare-balles, décomprimant ainsi sa cage thoracique. Il plonge ses mains derrière son dos et deux Glock automatiques entrent alors en scène.

Six ombres s’avancent en bataillon dans la pénombre des fondations.

195. Ext. Jour. Chantier.
Resté en retrait près des berlines, Estevez interpelle Williams. Il tient son cigare entre les doigts.

Estevez
Vous les gens de la police, vous avez du mérite ! C’est vrai, il faut le dire, vous avez pas un job facile, tous les jours vous risquez votre peau, et tout ça pour ramener combien à la fin du mois? 2000 ? 3000 ?

Williams
Je crois que c’est pas vos oignons !

Estevez
Moi, je vous donne l’occasion d’être payé à votre juste mérite, inspecteur ! Vos enfants rêvent peut-être de vraies vacances.

Williams
Laissez ma famille en dehors de ça ! Et vous ne m’achèterez pas!

Estevez
(son visage s’assombrit) Vraiment ?… Alors qu’est-ce que vous diriez d’un autre arrosage ?

Le nabab se tourne vers les grosses berlines garées devant l’immeuble. De l’une d’elles sort un nervi en costume sombre pourvu d’un AK47. Il est de ces tueurs prodigues qui dépensent sans compter jusqu’aux dernières cartouches. Williams se préserve des effusions derrière sa Chevrolet. Des morceaux de verre tombent sur lui. Un déluge de feu s’abat sur la voiture, explosant les vitres, criblant l’acier de la carrosserie. Un tel vacarme qu’on ne s’entendrait pas mourir. De l’autre côté du rempart, Williams attend de pouvoir riposter.

196. Int. Immeuble. Sous-sol.
Deux tueurs évoluent entre deux rangées de piliers. Du mouvement sur la droite ! Leur fantôme d’adversaire passe devant eux en exécutant une roue. Les balles lui frôlent la peau  comme les couteaux d’un lanceur de cirque. A la différence ici que la cible a une arme et leur rend la politesse en alliant gymnastique et précision du tir. Des guiboles sont fauchées au passage.

Les quatre derniers rappliquent en force et envoient la sauce à coups de mp5. Mario roule promptement au sol, trouve refuge dans un recoin d’escalier. Sa posture est critique, deux beretta 9 mm contre des pistolets mitrailleurs !

Examen du décor. Son regard se pose sur une lampe à pression suspendue au plafond. Cet objet incarnerait-il son salut ? Une balle bien ajustée sectionne l’attache de la lampe laquelle se fracasse deux mètres plus bas. De l’alcool se répand au sol. Mario balance un briquet comme il jetterait une grenade. Et le feu fut !

Un rideau de flammes l’isole de l’armada. Mario s’engouffre dans l’occasion et tente une sortie. Objectif l’escalier. Un flingue dans chaque pogne et à dieu vat ! Les balles fusent de part et d’autre du mur de feu, point d’orgue d’une orgie de fer. L’échange est court mais l’écrémage est sévère. Un tueur s’écroule, un morceau de crâne en moins. Un autre porte la main à sa gorge d’où s’écoule un flot de sang. Les deux derniers valides rechargent leur pistolet mitrailleur, offrant le temps à Mario de s’enfuir par l’escalier.

Mario retrouve le rez de chaussée. Une tâche rougeâtre macule son marcel blanc. Il porte une main à son flanc droit douloureux. Une grosse erreur que celle d’avoir ôté son gilet pare-balles.

197. Ext. Chantier.
Williams, toujours sous le feu ennemi, rampe jusqu’au niveau de la portière passagère. Il se redresse, parvient à l’ouvrir et à s’emparer d’un fusil à pompe posé contre le siège.

Le mitraillage et soudain le silence.
Doigt sur la gâchette, pressé de poser la touche finale à son travail, le traqueur contourne la Chevrolet. Son oreille reconnait le claquement sec d’un chargeur. Il fait volte-face mais Williams ayant encore de bons restes, in fine c’est lui qui y reste. Deux balles de fusil à pompe dans le ventre terrassent le chasseur.

Un nouveau danger arrive de l’arrière, que Williams n’a pas pas calculé. Une balle le frappe. Le flic s’affale en se tenant sa jambe droite. Son instinct de conservation, aveugle à la douleur, lui commande de ramasser son arme, mais une injonction l’en dissuade.
Estevez s’avance vers lui, un pistolet mitrailleur à la main.

198. Int. Immeuble
Mario arrache une banderole de travaux balisant le périmètre du premier étage à défaut de garde-fou. De l’autre côté c’est le vide. Il noue l’extrémité de la banderole à un morceau de structure.

199. Int. Immeuble.
Les deux fines gâchettes survivantes remontent au rez de chaussée. Chacun se sépare, l’un continuant vers le premier étage, l’autre inspectant le présent niveau.

Un bruit de cailloux frappant le sol. Le sbire en charge du rez de chaussée rappelle son acolyte en train de monter l’escalier. Tous deux prennent la direction des cailloux, en ne faisant plus qu’un avec leur AK47.

Ils traversent le rez de chaussée jusqu’à la limite ouverte de la pièce. La terre ferme se trouve encore à un mètre en contre-bas. Une fumée noire s’échappe du sous-sol. Tous deux lèvent la tête sans s’attendre à recevoir le ciel sur la tête…

Au premier étage, Mario tire sur sa corde de fortune pour s’assurer du mou. Accroupi, le dos au vide, cramponné des deux mains à sa banderole, il guette le moindre mouvement au-dessous de lui. Il calcule le bon moment pour se laisse tomber en rappel, tel Tarzan accroché à sa liane. Le corps horizontal, il passe dans le rez de chaussé, les deux pieds en avant. Les tueurs en plein sur son passage se prennent un panard en pleine tronche et basculent en arrière.

Mario lâche la banderole et conclut sa cascade par une roulade. Les tueurs qui voient 36 chandelles, deviennent des esprits avant d’avoir retrouvé leurs esprits. Mario, dans la continuité de sa roulade, dégaine ses deux Beretta et leur plombe copieusement la tête.

200. Ext. La Chevrolet
L’inspecteur Williams se traîne jusqu’à l’aile droite de la voiture, sa jambe ensanglantée. Estevez le tient dans son viseur.

Estevez
Où est la bande ?

Williams
(mimant de ne pas comprendre) Vous cherchez votre bande de bras cassés ? Allez voir mais je crois qu’ils sont ad patres !

Estevez
(froidement) Vous vérifierez vous même !

Et il presse la détente.

201. Ext. Immeuble en construction.
Mario se relève de sa roulade lorsqu’un drôle de fruit tombe à côté de lui… Une grenade dégoupillée ! Il a juste le temps de s’éjecter du rez de chaussée juste avant l’explosion. Le souffle le jette néanmoins par terre, deux mètres plus bas. Il relève la tête et voit Harrisson arriver vers lui, tenant un AK 47 de sa main valide.

Harrisson
Fils de pute, tu crois que tu vas t’en tirer comme ça ?!

Mario dégaine son beretta. Le fédéral le désarme d’un coup de pied dans la main, mais plutôt que d’en finir tout de suite, entreprend un tabassage en règle. A chaque retour à la charge, Harrisson égrène le nom de ses hommes tombés au champ du déshonneur.

Harrisson
(en frappant dans les côtes et le ventre)Minelli ! Chandler ! Roscow !…

Mario goûte la poussière du chantier. Sa main trouve  une pierre. Retour à la charge d’Harrisson. Contre attaque de Mario qui parvient à bloquer sa jambe et à le déséquilibrer. Il se relève et se jette sur lui. Les deux hommes roulent par terre. Mario abat sa pierre sur le visage du fédéral avec une violence effroyable. Une fois, deux fois, trois fois…

Il jette la pierre ensanglantée et ramasse son beretta.

Une silhouette massive se dessine devant lui. Estevez brandit son Graal incarné dans une cassette audio. Un morceau de la bande pendouille hors du boîtier. De sa main gauche, il tient un briquet.

Estevez
Tu pensais nous baiser, mon p’tit Mario? T’as buté des fédéraux mais y a plus de témoins, maintenant! Ton copain le flic, pan pan ! Plus de témoins, plus d’enregistrement! (rire hystérique)Alors c’est qui le baisé ?

Le mafieux met sa menace à exécution et brûle la bande avec le briquet. Quelques secondes de jouissance que Mario lui facture au double du prix, de deux bastos dans le citron.

Mario ramasse la cassette à côté du cadavre encore chaud. La Chevrolet sur sa gauche lui offre un tragique spectacle, celui de l’inspecteur Williams gisant dans son sang. Mort. Au loin, des sirènes annoncent l’arrivée imminente de la police.
Mario, tenant sa cassette à la main, rejoint l’une des berlines garées devant l’immeuble en construction. Il traîne la patte, diminué, mais on le serait à moins avec une balle dans le flanc et vraisemblablement aussi quelques côtes fêlées ! Il monte dans la voiture, allume le contact et passe la première.

Un pan de la palissade du chantier explose au passage de la berline qui s’engouffre dans la rue adjacente.

202. Ext. Forest Hills, quartier du Queens. Dans la 66e Street. Maison des parents adoptifs de Mathilda.

Aucun bruit dans ce quartier résidentiel, si ce n’est le gazouillis des oiseaux et le ronflement lointain de tondeuses. L’endroit semble un havre d’harmonie. Seule fausse note à ce cadre idyllique, un véhicule de police garé devant le domicile. Là pour rappeler que même le diable se passe de cartons d’invitations partout où il va, même au paradis.

Une voiture s’arrête en face de la maison. Le visage de Gomez se reflète dans le rétroviseur.

(à bientôt pour le dernier épisode)

For Mathilda (7)

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Gomez
La Nissan rouge, à dix mètres derrière nous. Ça fait 10 minutes qu’elle est derrière nous.

Mario
Et alors? Y a cent bagnoles derrière nous !

Gomez lève le pied de l’accélérateur. Des voitures le dépassent sur la voie express.

60. Int. Jour. Voiture de Rachel

Rachel
Il ralentit… Je reste derrière lui ?

Mathilda
Non, double-le, ça va faire suspect.

Les deux véhicules se trouvent brièvement à la même hauteur. Les yeux de Mathilda et de Mario se rencontrent en un éclair. Il ne paraît pas la reconnaître derrière ses lunettes noires.

Rachel
Merde, un péage… Jusqu’où on va le suivre? Jusqu’à Philadelphie ?

Mathilda
(en se fouillant) J’ai de la monnaie.

60. Ext. Soir. Péage à la sortie du Queen Midtown Tunnel
Gomez s’acquitte du droit de passage. Six voies de circulation dans les deux sens et autant de files d’automobiles à l’arrêt. A plus de 21h, le gros rush est néanmoins passé. Rachel occupe une file voisine, sur la droite. Elle risque un coup d’œil vers la Chrysler.
Gomez dédie un regard glaçant à la conductrice qui détourne précipitamment les yeux.

61. Ext. Soir.
La Chrysler emprunte une sortie, juste après le péage. La Nissan suit ses traces à une distance raisonnable. La 2×3 voies laisse place à une large avenue dans Brooklyn cernée d’immeubles de quelques étages, la plupart en brique rouge, d’autres dont la façade fatiguée accuse le temps, mélangés à des commerces de proximité, des restaurants et des garages.

62. Int. Voiture de Rachel

Rachel (crispée)
Il m’a regardé tout à l’heure au péage, je suis sûr qu’il m’a grillée.

Mathilda
Je te dis que non, on les suit de loin.

63. Ext. Soir.
La Chrysler passe devant une zone de construction. Derrière un mur grisâtre, une grue toise son monde. A quelque cinquante mètres du chantier, un cinéma « Brooklyn West Cinema ».
La berline s’engouffre dans une ruelle à sens unique, juste derrière le bâtiment.

64. Int. Voiture de Rachel

Rachel (les yeux vers la ruelle)
Qu’est-ce qu’il va foutre par là ? (excédée) Mathilda, il est en train de nous balader !

Mathilda
Arrête-toi…

Son coup de frein impromptu lui vaut des coups de klaxon hostiles. Elle tend un doigt bien haut au mécontent.
L’oiseau, qui n’a pas vocation à s’attarder, disparaît à droite au fond de la ruelle.

Mathilda
On va le reprendre un peu plus loin. A la prochaine à gauche.

Rachel
(repasse la première, dans un soupir) T’as intérêt à ce qu’il y ait le gros lot au bout ! Je veux un super héros ou un chippendale !

65. Ext. Voiture de Rachel
Elle poursuit sur une centaine de mètres, retrouve une deuxième ruelle sur sa gauche et s’engage dedans. Une allée à l’ombre de deux immeubles de brique rouge flanqués de leurs escaliers de secours. Il y a des tags sur les façades.
La Nissan remonte la ruelle. La perspective est fermée par un paysage de béton derrière la grosse avenue au bout.
Une bagnole surgit de l’autre extrémité de la ruelle. La Chrysler se présente de face à la voiture de filature.

Rachel(en ralentissant)
Merde !

La berline avance doucement dans sa direction. Les regards des deux conducteurs s’interceptent. Rachel se fige, passive comme un piquet de métal qui attendrait la foudre.

Mathilda
Recule, Rachel !

La Chrysler accélère soudainement et vient à se coller à sa proie. Pare-choc contre pare-choc.

Mathilda
Mais recule !

Dans la panique, Rachel se trompe dans sa marche arrière. Grincement d’une boîte de vitesse qu’on martyrise. Mario descend de la menaçante voiture, une arme à la main et envoie une rafale dans le capot et dans les pneus de la Nissan, la stoppant en plein élan de marche arrière. Une fumée noire s’échappe du moteur.

Int. Voiture de Rachel
Rachel hurle de terreur. Comme le tireur s’approche, Mathilda verrouille les portières.
La jeune fille serre la main de son amie ; elle tient dans l’autre une bombe antigel. On peut s’attendre à ce que l’agresseur veuille fracturer la vitre passagère à coups de crosse. Or, il sort d’une poche une sorte de boitier électronique qu’il dirige vers la voiture… bip bip ! Déverrouillage de la portière.
Mathilda ne peut l’empêcher d’ouvrir la portière et s’en remet à sa bombe antigel pour l’aveugler. D’une manchette, Mario la désarme, la repousse sur le siège en la braquant avec son pistolet mitrailleur. Ses lunettes noires ne laissent transparaitre aucune expression dans son regard.
Rachel est en larmes. Son amie, mâchoire serrée, se serre contre elle. Son regard dit tout le mépris que peut lui inspirer Mario à cet instant.

Mathilda
(la voix étranglée par le choc) Tu voulais le gros lot, Rachel…

66. Ext. Nuit tombée. Les docks de Brooklyn. Au bord de l’Hudson
Un large quai bordé d’entrepôts. Des grues portuaires se découpent sur un ciel de nuit bleutée.
Des caristes vont et viennent entre une grosse barge amarrée et l’intérieur d’un hangar. L’architecture du bâtiment très imposante en briques rouges laisse à penser que c’était une ancienne manufacture.
67. Int. Nuit.
Depuis sa voiture garée à bonne distance, Gomez observe l’effervescence de fenwick avec des jumelles. Mario est à côté de lui.

Gomez
(tout en scrutant) Il y a deux gardes armés dehors. Je table sur une dizaine à l’intérieur… Ça va être sportif.

Il tend une photo à son partenaire. Sa lampe torche éclaire le faciès d’un homme aux chevaux blancs au regard solennel.

Gomez
La cible… On coupe à la racine, en faisant gaffe aux épines.

Des borborygmes étouffés attirent notre attention. Et de découvrir Rachel et Mathilda pieds et mains liées, bâillonnées, sur la banquette arrière.

Mario se retourne vers elles. Leur délicate posture semble le mettre mal à l’aise.

Mario
On les laisse pas là !

Gomez
(sourire froid) Si ! j’ai pas envie de m’emmerder avec des stagiaires…

68. Int. Entrepôt.
Les portes d’un utilitaire rempli de caisses se referment. D’autres camionnettes attendent d’être chargées. Des hommes armés surveillent. La fourgonnette sort du hangar.

69. Int. Voiture de Gomez
Une lueur éclaire l’habitacle.

Gomez
Cheval de Troie en approche… (dégaine de son holster un AMT Hardballer, un pistolet arme semi automatique) Go !

68. Ext. Quai. Camionnette
Deux individus dans le champ des phares. Coup de frein. Gomez ouvre la cabine du chauffeur. Ce dernier descend docilement, très attaché sa santé. Gomez s’assure de son silence d’un coup de crosse sur la tête avant de s’installer au volant. Mario monte côté passager. L’opération n’a pas pris vingt secondes.

69. Ext. Nuit. Entrepôt
Le véhicule intercepté rencontre un barrage à l’entrée. Un garde armé joue les douaniers.

Gomez
On a un peu de retard. On vient pour le chargement.

Garde
On a le compte des véhicules.

Gomez
On vient pourtant bien pour ça. Demandez à votre patron.

Garde (laconique)
Faites-voir le bon de chargement.

Gomez fait mine de chercher le papier. Il tient dans sa main droite un pistolet, canon pointé vers la portière. Au même instant, un deuxième garde s’approche du côté passager. Echange de regards avec Mario dont la main gauche se referme doucement sur son flingue calé entre les deux sièges.
Le chauffeur lui tend le bon de chargement.

Garde 1
(en le regardant) Il y a un tampon ! (sourcillant) Vous êtes le camion qu’est parti à l’instant! Mais c’est pas vous que j’ai vu !

Gomez tire à travers la portière, envoyant ad patres le douanier. Le mode silencieux étouffe la détonation. L’autre garde est abattu, dans une action coordonnée de Mario. Le chauffeur écrase le champignon. Crissement des pneus. La camionnette fait une entrée fracassante dans le hangar.

70. Int. Entrepôt.
D’énormes rayonnages hauts de plusieurs mètres remplis de caisses. De chaque côté des murs d’étagères, un large espace de circulation investi par les camions et les fenwick. Il y a un deuxième niveau, occupé par des bureaux visibles depuis le bas.
Maxwell entouré de deux gorilles, observe les opérations depuis une mezzanine métallique au premier étage. Il assiste en toute première loge à l’attaque. Ses gardes du corps se pressent de l’évacuer dans les bureaux.

Gomez lance la camionnette sur les murs de rayonnage le long desquels sont déployées des sentinelles. Mario et lui s’éjectent avant l’impact. Un formidable fracas métallique. Un garde, moins réactif, que les autres, se trouve écrabouillé contre un pilier.
Nos deux tueurs se réceptionnent sans dommage sous le tir nourri des gardes revenus de leur surprise. Ils se redressent sur leurs jambes et partent au feu chacun de leur côté.

Les balles glissent sur Gomez qui a bien pris soin de se munir de son porte-bonheur… Un pistolet mitrailleur. Ses adversaires sont fauchés à la volée. Le tueur trouve dans les chariots et les camions des points de repli, pour mieux repartir à la charge. Des caristes tombent sous les balles dans des explosions de verre et une grêle de fer.

Mario, derrière un fenwick, essuie des tirs groupés sur sa droite. La largeur du hangar amplifie l’écho furieux des balles. Une grenade l’aide à faire place nette. Deux gardes sauvent leurs miches in extremis, un autre encaisse la déflagration en pleine face. Sa jambe droite est sectionnée nette. Mario recharge son pistolet mitrailleur, grimpe dans le chariot élévateur et passe la première. Une main sur le volant, l’autre préposée au canardage. Les deux sbires encore sur pied ramassent leur arme mais échouent à riposter, criblés de pruneaux.
Un noyau dur de trois gangsters avec des mitraillettes surgit de derrière un camion, sur sa gauche, et vide son chargeur vers lui. Mario se baisse mais doit sûrement sa vie à la pile de caisses empilée sur les fourches du fenwick.

Il écrase l’accélérateur, et monte au front, baïonnette au canon. Le mur d’artillerie se disloque avant l’impact. Mario saute du chariot électrique, qui finit sa course contre un rayonnage, et se jette sur un garde. Les deux hommes roulent au sol. Mario prend le dessus en l’immobilisant et lui loge une balle à bout portant. Une nouvelle salve l’oblige à rouler sous le camion. Pénurie de munition ! Son salut vient de la mitraillette du défunt garde. A plat ventre, Mario donne la réplique aux deux assaillants. Après un échange nourri, il obtient le dernier mot.
71. Int. Entrepôt
Gomez longe les rayonnages en tenant son 11mm des deux mains. La mezzanine le surplombe. L’éclairage renvoie sur le sol l’ombre de la rambarde. Une ombre, humaine celle-ci, se dessine au dessus de la balustrade. Gomez fait montre de réflexes salvateurs. Le garde, copieusement plombé, dégringole du parapet et s’écrase six mètres plus bas. Le tireur ramasse sa mitraillette et monte vers la mezzanine.

Un sbire déboule d’un des bureaux pour le gratifier d’une rafale automatique. Gomez s’aplatit sur les dernières marches et répond du tac au tac… ou plutôt du tac tac tac ! Atteint à la jambe droite, l’homme de main se replie dans le bureau.

Gomez rejoint la plate-forme métallique et, dos au mur, évolue vers la porte en verre du bureau. Une volée de mitraille est tirée depuis l’intérieur, faisant voler en éclats la vitre. Le mercenaire sort une grenade de sa ceinture, la dégoupille et la baratte dans le trou béant. Une explosion fait trembler toute la structure.
Gomez entre dans la pièce dévastée. La fumée laisse entrevoir un monceau de gravas (le plafond est à moitié effondré) des débris de plâtre et du verre partout. Le cadavre du garde
à proximité d’un mobilier soufflé.
Une porte communique avec le bureau voisin. Il y pénètre, précédé de sa pétoire. Personne. Son flair l’oriente vers l’issue de secours du bureau.

72. Ext. Nuit. Entrepôt
Maxwell dévale les dernières marches de l’escalier. Une Mercedes est garée au bas. Il actionne le déverrouillage des portières, s’engouffre avec son attache case. La voiture s’ébranle dans un crissement de pneus.
La berline descend vers la bordure de quai. Mais au tournant du hangar, surgit un fenwick avec les fourches en avant. Les deux véhicules rentrent en collision, quasi frontalement. Le choc, violent, projette la Mercedes sur trois mètres. Mario, assis sur le chariot, fait feu sur les carreaux avant. La pétarade claque dans la nuit. S’ensuit un silence de mort que trouble juste le ronronnement du moteur.

Mario repart dans la direction opposée, au volant du chariot.

73. Ext. Nuit. Quai.
Mario se véhicule jusqu’à la bagnole de Gomez. Les portières sont verrouillées. Il parvient à ouvrir en brisant une vitre avec la crosse de son pistolet. Les deux jeunes filles se trouvent toujours allongées ligotées sur la banquette arrière. Il tire les deux prisonnières, l’une après l’autre, hors de la voiture. Il débâillonne Rachel lui donnant toute liberté pour hurler. Fermement, il applique une main sur sa bouche.

Mario
Je te libère mais tu coupes l’alarme, ok ?

Rachel acquiesce d’un hochement de tête. Il sort un canif et tranche ses liens.

74. Ext. Nuit. Quai.
Gomez s’approche de la Mercedes dont le moteur tourne toujours. Les vitres explosées donnent le spectacle du cadavre de Maxwell, sa tête couchée sur le volant. Un cri au loin sur le quai éveille son attention. Il éjecte le macchabée hors de l’auto pour se mettre au volant.

75. Ext. Nuit. Quai.
Mathilda n’a pas avalé toute sa salive et s’en gardait pour son ravisseur qui écope d’un beau crachat sur ses vêtements. Mario, impassible, sort un couteau pour trancher ses liens.

Mario
Je sais ce que tu penses… Mais si t’avais pas joué les flics, on n’en serait pas là.

Rachel, de nouveau libre, est adossée contre la voiture, les yeux hagards, en état de commotion. Les phares d’un véhicule arrivant de la zone de l’entrepôt. La vue de la lumière provoque comme un électrochoc chez la jeune fille qui se lève et se met à courir dans sa direction.

Rachel
Une voiture ! Oh merci, mon dieu ! Arrêtez-vous ! Arrêtez-vous !

Mario
(hurlant) Non ! Revenez !

Il court à sa poursuite mais Rachel a déjà fait stopper la voiture. Les yeux de la jeune fille se révulsent de terreur lorsqu’elle identifie le conducteur. Gomez ouvre la portière, le canon d’une arme dirigé vers elle. Le coup part… atteignant sa cible en pleine tête. L’assassin encaisse alors un retour de bâton, touché à son tour à l’épaule par Mario malgré tout arrivé trop tard. Gomez tente de se ressaisir mais son partenaire fond sur lui et parvient à le désarmer en écrasant son bras avec la portière. Le 9 mm tombe sur le bitume. Gomez, assis devant le volant, fait face à un calibre braqué sur lui.

Gomez
(en se tenant son épaule ensanglantée) Qu’est-ce qu’y t’arrive, putain? Toutes les deux, elles connaissent notre gueule !

FOR MATHILDA (4)

Photo glanée sur le blog :  Dpixel365's Blog Everyday Life captured in a single moment
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26. Ext. Jour. Une rue passante de Little Italy.
Mathilda et Rachel, sa meilleure amie, marchent d’un pas flâneur. Rachel, dans les mêmes âges que Mat, est une belle petite blonde, en jean et t-shirt sobre, avec des cheveux lisses attachés en arrière,

Rachel
Tu viens avec moi à la fête?

Mathilda (songeuse)
Je ne sais pas. J’ai encore du travail.

Rachel
Mat ! tu vas pas me faire ça ! Ce soir c’est la fête ! et le seul truc que tu vas étudier ce sera des beaux petits culs de mecs.

Mathilda
Ecoute, j’ai pas la tête à ça.

Rachel
Mais t’as jamais la tête à ça ! Tu veux pas finir vieille fille !

Mathilda
Non ! (sur un ton mystérieux) J’ai vu un garçon hier soir.

Rachel (avec excitation)
Aaah ! (bombardement de questions) Comment il s’appelle ? Il est d’où ? De la fac ? Je le connais ?

Mathilda
C’est le type qui m’a sauvé dans le parc… Il est passé au magasin hier soir.

Rachel
C’est formidable ! J’espère que cette fois t’as pu te jeter à son cou ! Dis-moi tout !

Mathilda
Il doit avoir dans les 25 ans, plutôt beau gosse, mystérieux. Je sais pas grand chose sur lui. Juste qu’il s’appelle Mario.

Rachel
Quoi? Et c’est tout? Vous vous êtes dit quoi?

Mathilda
Il aime les bégonias, il m’en a acheté un. J’en ai pas su beaucoup plus…

Rachel
Mais il fallait le tanner ! Est-ce que tu l’as mis à l’aise, au moins ?

Mathilda
Ben, j’ai bien pensé à le faire s’asseoir et à me frotter à une barre en cuivre (imitant le mouvement d’une gogo danceuse) Ecoute, avec ses lunettes noires et ses phrases au compte-goutte… Je n’avais pas peur, non… Mais il me troublait!

Rachel
Il bosse peut-être dans un truc secret, genre CIA ! Vous vous reverrez?

Mathilda
Je ne sais pas.

Rachel
(déçue) Çà veut dire non… T’as pas assurée, ma vieille.

Mathilda
C’est mieux ainsi, s’il est du genre barbouze. Je veux pas épouser un courant d’air!

Rachel (avec des yeux coquins)
Qui te parle déjà de l’épouser? Tu brisais la glace au pieu.

Mathilda
(agacée) Je suis pas une Marie couche-toi-là, d’accord ?… Moi j’ai besoin d’aimer vraiment pour le faire…

Rachel marque un arrêt cependant que son amie continue de marcher.

Rachel
(lui crie) Et à quoi tu le reconnaîtras le vrai amour si tu l’as jamais vu avant?

27. Ext. Entre chien et loup. Mulberry Street.
L’avenue est envahie de monde pour le coup d’envoi des festivités de San Gennaro.
Des chars fleuris cheminent entre deux rangées d’étals de chaque côté du boulevard. Sur l’un d’eux, des musiciens coiffés d’un béret aux couleurs de l’Italie jouant de la trompette. Tout un cortège de chars, de fanfares, de gens déguisés en costume folklorique. Une pluie de confettis.
La foule se presse aux dizaines de stands de pâte fraîche, de pizzas et de glaces, installés en bordure.
Des costumes traditionnel de diverses provinces d’Italie, Sardaigne, Vénétie. Sont convoqués également, les grandes figures de la culture latine en particulier de la commedia del arte, entre autres des Arlequin.

28. Ext. Soir. Ruelle.
Une demi-douzaine d’arlequins longent une ruelle adjacente à Mulberry Street. Certains tiennent leur masque à la main. Ils rigolent, quelques uns fument une clope. Ils passent devant une porte dérobée métallique qui donne sur l’arrière d’un commerce.

Au passage du dernier arlequin un peu à la traîne, la porte s’ouvre et une main le happe vers l’intérieur. Un bruit de coup de poing. Les autres continuent sans ne se rendre compte de rien.

L’arlequin ressort et va rejoindre ses camarades. A la différence que ce n’est plus le même. C’est Mario.

29. Ext. Soir. Mulberry Street.
Des Arlequins avec leur costume bigarré et leur masque grimaçant, exécutent une danse tout en suivant un char fleuri. Au dessus de leur tête, des illuminations. Mario s’immisce dans la parade en tentant de se caler sur la chorégraphie. Son attention se tourne très vite vers la foule amassée. Sur sa gauche, un restaurant italien, à l’enseigne brillant de mille feux : Chez Minelli.
Un groupe d’hommes en costume austère parlent devant l’entrée du resto.
Mario fait mime de parader sans les lâcher des yeux. Les deux types rentrent dans le restaurant.

Mario s’éclipse du cortège en continuant ses airs de danse.

30. Int. Le restaurant Minelli.
L’établissement est plein. Mario entre et cherche des yeux les deux individu. Aucune trace d’eux. Arrive un serveur au crâne dégarni.

Serveur
Bonsoir monsieur. Vous désirez une table?

Mario
Des hommes en costume gris sont entrés. Où sont-ils ?

Le serveur (sourcils froncés)
Vous avez réservé avec eux ?

Mario
Non.

L’homme
Alors je n’ai pas à vous répondre. Vous prenez une table ?

Mario (froid)
Où sont-ils ?

L’homme (sèchement)
Bon, écoutez, ou vous prenez une table, ou vous retournez parader avec vos petits copains dehors.

L’arlequin dégaine un silencieux qu’il lui colle contre la tempe. Des clients attablés glapissent de terreur.

Mario
(rugissant) Dernière fois ! Où ils sont ?

L’homme (pétrifié)
Oh, déconnez pas ! je suis pas censé vous le dire, moi. Ils me feraient la peau.

Mario
(en pressant un peu plus le canon du flingue) T’as cinq secondes.

L’homme
Ok ok ! La porte au fond, derrière les chiottes !

Mario (l’entraîne, toujours sous la menace de son arme)
Viens avec moi.

Les dîneurs les regardent traverser le restaurant, stupéfaits.

31. Int. Une salle envahie de fumée de cigarette.
Quatre hommes en costume réunis autour d’une table, parmi lesquels le dénommé Gonzales reconnaissable à sa moustache. Il règne comme une légère tension dans la pièce, qui est sans doute imputable à la valise pleine de biftons en jeu. Devant la porte, un molosse armé.
Gonzales recompte la somme.

Un acheteur (avec impatience)
On peut voir la came ?

Au signal de son chef, l’un des molosses dépose une valise sur la table. Gonzales l’ouvre. A l’intérieur, reposent plein de sachets de coke.

32. Int. Un couloir aux murs ternes et fissurés
Le serveur conduit Mario jusqu’à une sorte de porte coupe-feu. Il pointe du doigt la lourde.

Mario
(en lui imprimant la marque du canon sur le front) Barre-toi .

L’otage ne se fait pas prier et se carapate. Mario soulève le haut de son costume d’arlequin, découvrant une ceinture avec des munitions et des explosifs. Il en tire un détonateur qu’il colle à la porte.

33. Int de la salle.
On frappe à la porte. Un molosse, l’arme à la main, ouvre un judas.

Lui
Le mot de passe ?

Mario
L’aigle va fondre sur la vieille buse

Bouledogue
Quoi ?!

Mario gare ses miches juste à temps, avant l’explosion de la porte. Le bouledogue est projeté dans le souffle. Mario enjambe les débris, armé de son silencieux. Les trafiquants autour de la table défouraillent avec un temps de retard. L’assaillant les abat chacun avec maestria. Des éclaboussures vermeilles sur les murs. Le tueur s’approche du garde blessé par l’explosion, gémissant. Il abrège ses souffrances.

Deux gardes se rameutent, du fond du couloir, emmenés par le serveur qu’a laissé partir Mario. L’un d’eux, apercevant Mario, ouvre le feu avec un pistolet mitrailleur. Ce dernier bascule la table en fer pour s’en servir de rempart. Il change son silencieux pour des calibres supérieures.
Un déluge de feu se déverse sur le bouclier de fortune. Le raffut métallique des balles criblant la table.
Mario opère une sortie éclair, un pistolet 9 MM dans chaque main. Les tirs se croisent. Les deux canardeurs, tous deux fauchés aux jambes, s’effondrent dans une grimace de souffrance. Un blessé à terre dépense ses dernières réserves pour viser Mario. Il n’a pas le temps de mener à bout son action. Une balle dans la tête pour lui et l’autre éclopé.

Mario évacue le champ de bataille. Il veut reprendre par le couloir, mais se heurte à nouveaux renforts en face. Trois gaillards armés. Mario tire une grenade fumigène de sa ceinture de survie. Un nuage de fumée s’épanouit. Des toussotements frénétiques. Le spadassin masqué range ses flingues, sort un couteau et se jette dans la mélasse de brume. D’horribles sons de pénétration de chair et des râles.

La fumée se dissipe. Des giclées de sang sur les murs. Un homme est étendu, sur le carreau. Les deux autres sont blessés. Le plus valide relève l’autre.

34. Int. Cuisine du restaurant.
Mario traverse les fourneaux, son surin ensanglanté à la main, sous le regard pétrifié du personnel. Il sort par la première porte de service.

35. Ext. Une ruelle.
L’arlequin remonte vers Mulberry Street où la fête bat son plein.

Deux truands, survivants du massacre, sortent par la même porte et s’entendent pour prendre la direction du cortège. L’un d’eux se tient les côtes, sûrement blessé à cet endroit. L’autre présente une rigole de sang le long d’un bras.

36. Ext. Mulberry Street.
Les hommes de main se frayent un passage dans la foule amassée, cherchant du regard le mystérieux saltimbanque.

Mario danse maladroitement au milieu d’autres artistes en costume. Il prend une clarinette des mains d’un clown musicien, lequel proteste et lui arrache l’instrument

Les tueurs évoluent dans la foule, leur attention toute tournée sur les héros de la commedia del arte. Lequel est leur homme? L’attention d’un d’eux se porte sur un danseur, plus guindé que les autres.

Des danseurs en costume traditionnel invitent des spectateurs à faire des pas de danse avec eux. Au milieu du public, une jeune fille arrête l’attention de Mario. C’est Mathilda accompagnée de son amie Rachel. Il s’approche d’elle, et l’invite à la suivre dans le cortège.
Elle se laisse entraîner en riant.

Les soupçons des gangsters s’évaporent. Un flic en uniforme surgit sur leur gauche.

Mario (tandis qu’il danse avec Mathilda)
Au café Fellini à 22 heures.

Mais elle ne l’a pas reconnu sous son masque.

Mathilda(surprise)
Pardon ?

(il soulève furtivement son masque)

Mathilda
Mario ?

Lui
Au café Fellini à 22h. J’y serai

Il lui lâche la main et retourne se noyer dans la foule. Mathilda reste plantée, l’air de n’y comprendre plus rien.

Pendant ce temps, le flic en uniforme a remarqué du sang sur le bras d’un des gangsters.

Le policier (une main sur la crosse de son arme)
Eh ! Qu’est-ce qu’il vous est arrivé ?

L’autre dégaine instantanément un 9MM et l’abat froidement. Cris de panique dans la foule.
Les tueurs s’échappent par une petite ruelle.

Un attroupement autour du cadavre du flic. Parmi les badauds, se trouve un Arlequin, lequel gagne à son tour la ruelle.

37. Ext. Un parking.
Les deux assassins s’engouffrent dans une berline noire.

38. Int. La voiture.

Le tueur blessé (à l’autre)
Merde, t’étais obligé de buter ce flic ?

L’autre
Oui ! Et ça devrait être le cadet de tes soucis. Maxwell va jamais nous pardonner ce qui est arrivé. On a pas assurés. Putain, Gonzales est mort !

L’un
Mais ce type ? C’était qui, nom de dieu ? Pour qui il travaille ?

L’autre (en tournant la clé de contact)
Je veux pas le savoir. On met les bouts !

La voiture démarre. Elle longe une rangée de voitures. Direction la sortie du parking. Soudain, une forme surgit de nulle part .

L’arlequin fantôme les tient en ligne de mire. Il ne laisse aucun temps de réaction aux deux passagers.
Le pare-brise est repeint de rouge. La bagnole finit sa course dans une autre. Une alarme rugit.

FOR MATHILDA ( 2)

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14. ext. Le parc, dans le secteur de l’agression.
Mathilda se trouve à bord d’une ambulance. La police est là. Un officier, les cheveux crépus et le teint hispanique finit d’interroger la jeune fille qui tient un glaçon sur sa lèvre.

Mat (décrivant Mario)
Il était grand… Plus d’un mètre 80. L’air italien avec des lunettes noires. Plutôt beau garçon.

Le flic (en prenant des notes)
Ok, ça va être bon, mademoiselle. On va vous laisser vous reposer.

Mathilda (à l’infirmier qui se trouvait à côté)
Je dois vraiment aller à l’hôpital?

L’infirmier
C’est juste une radio de contrôle.

Les portes se referment. L’ambulance démarre sans sirène. L’inspecteur regarde s’éloigner le véhicule. Un collègue vient à sa rencontre.

Flic 2
Alors ?

Flic 1
Alors rien. J’ai une description très vague. Tout ce que je sais sur notre justicier, c’est qu’il est rompu au combat, qu’il n’aime pas trop les flics et qu’il sait très bien faire les nœuds.

Flic 1
C’est tout le portrait de Rambo, ça.

Flic 2
J’sais pas si c’est Rambo, mais ça fait un bout de temps qu’ici c’est la jungle.

En disant cela, il regarde un de ses collègues faire monter le jeune drogué à l’arrière d’une voiture.

15. Int. L’appartement de Mario.
Il est dans sa cuisine. Une cuisine tout ce qu’il y a de plus classique, avec des jolies fleurs sur la table. Mario vérifie le fonctionnement d’un pistolet silencieux. Il essuie le canon avec un petit chiffon. Sur la table, une mallette posée avec dedans pleins d’armes de type différent dedans. La télé est allumée. Un bulletin d’infos.

Le journaliste
Un homme a été abattu en fin d’après-midi devant un arrêt de bus sur Atlantic Avenue. La victime, William Dawson, était le comptable d’Albert Cooper, l’homme d’affaires propriétaire de la chaîne Mystic Hotel, actuellement entendu dans une vaste affaire de trafic de drogue. D’après les premiers éléments de l’enquête, le tireur aurait agi depuis un toit d’immeuble. Aucune hypothèse sur le mobile n’est pour l’heure privilégiée. Deux autres homicides ont été enregistrés….

Mario range son silencieux dans la mallette. Le petit cocker qu’il a trouvé dans le parc vient le trouver en frétillant de la queue.

Mario (en le caressant)
T’as faim? Qu’est ce que je pourrais te trouver à manger ?

Il lui trouve un morceau de charcuterie dans le frigo.
Le portable de Mario sonne. Une voix rauque à l’autre bout du fil.

Mario
Oui…

La voix
C’est Gomez. Je viens de voir le dernier flash. C’est du bon boulot, Mario. L’élève va égaler le maître.

Mario (en se dirigeant vers son balcon)
Merci, ça me touche. Tu m’appelles juste pour me jeter des fleurs ?

Gomez
En fait non. Estevez veut nous voir toi et moi ce soir. Pour un contrat.

Mario
Pourquoi tous les deux ? Je préfère fonctionner seul maintenant.

Gomez
C’est qu’tu deviens associable, en vieillissant ! Allons, ça te rappellera tes premières années. Quand t’étais qu’une bleusaille.

Mario
Ouais… Je suppose que j’ai pas le choix.

Gomez
T’as tout juste. Je te prends à 19h. Sois prêt, gamin.
(Il raccroche)

Sur son balcon, Mario regarde New York la nuit. Il y a des plantes vertes sur le balcon.

16. Int. L’arrière salle d’un restaurant.
Comme mobilier, un vague bureau en bois avec des plantes vertes près des fenêtres aux stores tirés. C’est là où Estevez convoque ses hommes de main. Estevez, est un moustachu, les traits taillés à la serpe, type américain du sud qui fume comme un sapeur.

Gomez est assis en face de lui. Il est plus âgé que Mario, dans les 35 ans environ. Il porte une moustache fine d’espagnol, comme Don Diego de la Véga dans Zorro. Mais ses petits yeux pervers le rendent moins sympathique que Don diego.

Gomez (après avoir raccroché)
Ça marche. Il ne se doute de rien.

Estevez
Parfait.

17. Int. Une voiture.
Gomez et Mario sont à bord. Il fait nuit. La voiture longe les grandes artères éclairées de New York. Gomez est au volant. Ils n’échangent pas une parole.

18. Ext.
La voiture quitte les grands boulevards pour s’enfoncer dans des petites rues mal éclairées et inquiétantes.

Mario (sur ses gardes)
Hé ! C’est pas dans la direction de chez Estevez.

Gomez
Ah ? Je t’ai pas dit ? Il y a eu un petit changement au programme.

Mario sort un pistolet de la poche de son manteau qu’il pointe vers Gomez.

Mario
(menaçant) C’est quoi ce plan ? Ou tu m’emmènes ?

Gomez (en souriant) Relax, mon vieux ! Nom de dieu, Mario, je te connais depuis des années. Je t’ai tout appris. Et tu me fais toujours pas confiance ?

Mario (gueulant)
Dis-moi où on va !

Gomez
Voir Estevez, je te dis ! On a convenu le rendez-vous ailleurs. Mario, merde, range ta pétoire, ça part vite ces machins-là!

18. Int. Un parking souterrain à différents niveaux.
La voiture s’engouffre à l’intérieur. Elle descend trois niveaux. Il y a plusieurs rangées de voitures garées. L’endroit est très sombre, un vrai coupe-gorge. Gomez gare sa voiture entre deux piliers. Mario le pointe toujours avec son gun.

Gomez (en le regardant avec insistance)
Qu’est-ce que tu fais ? Tu me descends tout de suite, ou on va voir tous les deux Estevez ?

Mario (en tournant la tête vers l’extérieur)
Où il est ?

Gomez (en sortant)
Suis-moi.

Mario sort à son tour. Il suit Gomez. Il a rangé son gun, mais est toujours sur ses gardes. Les deux hommes se dirigent vers une grosse berline isolée, garée dans un coin du parking. Trois hommes descendent de la berline. Parmi eux, Estevez, dans un costume chic.

Estevez
(sur un ton paternel) Ah ! Mes enfants !

Il fait la bise à Gomez, comme un bon vieux mafieux. Mario reste sur ses gardes.

Estevez
Eh bien ! Alors jeune blanc-bec, on ne dit pas bonjour à son aîné ? Il a aussi peu de savoir-vivre que ses têtes de contrat.

Il s’esclaffe.

Gomez
Mario est aussi méfiant qu’une gazelle. Il pensait que je l’emmenais au casse-pipe.

Estevez (en le secouant)
Mario, mon petit, tu m’offenses ! Tu me crois capable de te faire un coup tordu ? Je te respecte! T’es jeune, mais t’es déjà plus dangereux qu’un banc de piranhas. (à Gomez) Je voudrais pas me fâcher avec lui, j’y perdrais des plumes, c’est sûr ! C’est une vraie terreur.

Gomez (fier)
Ouais, je l’ai bien formé. Il tient tout de moi.

Estevez (en tapotant l’épaule de Mario, impassible)
C’est vrai, je te respecte, t’as toujours été réglo avec moi. Je t’aime bien, tu sais… Mais ne m’en veux pas, pour ce coup là.

Gomez sort soudainement un pistolet de la poche de son imper et tire sur Mario en plein dans les côtes. Ce dernier titube, les yeux dans le vide, avant de s’effondrer.

Gomez
A vue de nez, je dirais qu’il en a pour une bonne demi heure de roupillon.

19 . Int. Le parking souterrain.
Intérieur de la berline d’Estevez. Mario est endormi à la place du conducteur.
Il reprend ses esprits. Il s’interroge. Qu’est ce qu’il fait là, dans cette voiture ? Que lui est-il arrivé ? Il regarde s’il y a une clé de contact pour démarrer. Niente. Il sort de la voiture, regarde tout autour de lui
Les phares d’une voiture qui s’allument. L’auto se tire du parking dans un crissement de pneus. Mario la voit qui arrive à toute vitesse vers lui. Il a juste le temps d’apercevoir un pistolet mitrailleur qui dépasse de la vitre passager. Il se couche avant le mitraillage.

Il comprend qu’il est tombé dans un piège. Il attend que la voiture tueuse fasse à nouveau le tour du parking. Il se plante au beau milieu d’une allée. La voiture tueuse surgit à nouveau sur la droite. Elle lui arrive en pleine face. Mario fait feu avec un puissant automatique. Les balles étoilent le pare-brise. Mario voit la voiture zigzaguer et percuter un autre véhicule garé.

Trois types s’échappent de la bagnole. L’un d’eux arrose Mario avec son pistolet mitrailleur. Ce dernier court se protéger derrière le cul d’une voiture garée. Les balles crépitent sous ses pieds sans l’atteindre.

Gros plan sur Mario, accroupi contre le pare-choc d’une voiture. Il regarde son chargeur. Plus que deux balles ! Il n’a pas le droit à l’erreur.

Mario évolue accroupi, entre deux rangées de véhicules. La rangée est assez clairsemée et il se trouve par moment à découvert. Il regarde sans arrêt autour de lui, comme une biche aux abois. Sur sa droite, une ombre se dessine. Mario se retourne à temps. Il plonge entre deux voitures pour échapper à une volée de balles. L’ombre se rapproche lentement.

C’est un Noir en costume cravate, le visage de marbre. Il a tout l’air d’un professionnel. Il tient un automatique. Il inspecte chaque recoin entre les voitures garées, prêt à balancer la sauce.

Mario est couché à plat ventre sous une berline. Il entend les pas du tueur se rapprocher. Les bottes en cuir passent à quelques centimètres de lui.
Mario retire ses chaussures, défait les lacets qu’il noue ensemble. Il attend que les bruits de pas s’éloignent, pour s’extraire de sous la bagnole. Embusqué derrière l’aile, il frappe la carrosserie avec le crosse de son arme.

Le tueur, en alerte, revient sur ses pas. Mario jaillit de la voiture et lui jette son chargeur en pleine figure. Il profite de la surprise pour aller au contact et le plaquer contre le capot d’une voiture voisine. il lui cogne le bras à maintes reprises contre le capot, pour le désarmer. La main lâche le flingue. Mais le black est robuste et lui fiche un coup de pied dans le ventre. Mario titube, le souffle coupé. Le tueur veut profiter pour récupérer son arme tombée. Mario revient à la charge et lui enroule son lacet autour du cou.

Le tueur suffoque. Il essaie de se libérer, mais la prise est solide.
Un autre tueur surgit devant qui fait feu sur eux. Mario se sert du corps du premier comme d’un gilet pare-balles. Mario balance le cadavre, se jette par terre pour s’emparer de son arme et faire feu sur son adversaire. Après un échange nourri, ce dernier s’écroule touché, en pleine tête.

Mario court dans le parking, le pistolet du premier tueur à la main. Il arrive au bout de la rangée de bagnoles, à proximité de la sortie sur sa gauche.

Un troisième tueur se tenait tapi sous cette voiture. Il en sort, aussi silencieux qu’un chat. Son ombre se dessine derrière Mario.
Le miroir installé près de la sortie du parking renvoie sa silhouette. Mario s’en avise par un coup d’œil. Il se fige, se jette sur le côté tout en accomplissant une totale rotation. Echange de tirs. Le tueur s’écroule, atteint en plein visage.
Mario s’avance vers le corps, fouillant la pénombre avec son arme, à l’affût d’éventuels assaillants.

Une voix
Bravo ! Wonderful !

Une cible en approche. Mario marche vers celle-ci en les mettant en joue. Nous reconnaissons Estevez.

Estevez
(sur un ton solennel) Une épreuve réussie haut la main… ou plutôt haut les mains !

Mario
(son arme pointée sur le doigt) Espèce de fils de pute!

Gomez surgit de sa droite en le tenant en joue

Gomez
Tout doux, gamin ! Faut pas être sanguin, comme ça !

Mario
(en le braquant à son tour) T’étais de mèche, salopard ! Bordel, ça rime à quoi tout ça !

Estevez
Prends ça comme un petit entraînement surprise, mon petit. Un entraînement, ça n’a jamais tué personne, hein ! Enfin, si en l’occurrence, mais eux ils savaient avant de saigner… de signer.

Mario
(bouillonnant) Je devrais vous buter !

Estevez
(très calme) Allons, allons, mon petit, garde des munitions pour ton prochain contrat. Un beau contrat que tu as largement mérité ! Crois-moi, quand tu verras le petit chèque en jeu, tu recommenceras à m’appeler papa.

Estevez
(en réajustant le col de son manteau fourré) Allez, on en discute demain ? Gomez, tu le surveilles jusqu’à ce que je sois remonté dans ma voiture ? Ce petit est très doué. Il a beaucoup du sang froid mais il a le sang chaud.

Gomez a toujours son arme dirigé sur Mario lequel n’a toujours pas baissé la sienne.

Gomez
(avec un sourire ironique) Petit chouchou !

20. Int. La chambre de Mathilda.
Des posters sur les murs, dont beaucoup d’affiches de films parmi lesquelles Heat avec De Niro et Pacino et Impitoyable de Clint Eastwood.
Elle est allongée sur son lit. Elle lit un livre de psychologie avec des écouteurs dans les oreilles. Sa tante Maud pousse doucement la porte. Mathilda enlève ses écouteurs.

Maud
Mathilda ?

Mathilda
Oui ?

Maud
Comment te sens-tu ?

Mathilda
(dans un soupir) Temps clément sur la plus grande partie de mon être. Prochain bulletin météo demain à la même heure ?

Maud
Tu sais, je ne cherche pas à t’embêter. Oh, peut être que je t’embête parfois, mais toutes les bonnes mamans embêtent toujours un peu leurs enfants, quand c’est pour leur bien.

(La jeune fille reste silencieuse)

Maud (poursuivant)
Je sais ce que tu as vécu. Mais je veux que tu saches que si tu as besoin de me parler, je suis là… Je serai toujours là… A t’écouter. Du moins autant de temps que Dieu acceptera de nous garder sur cette terre, ton oncle John et moi.

Mathilda (en essayant de lui sourire)
Mais ça va, Maud.

Maud s’assoit au bord de son lit.

Maud
Si ce monstre t’avait fait plus de mal… Je… Je…

Mathilda
C’était juste un pauvre toxico, tu sais. Mais je suis forte, hein… j’ai de l’entrainement au malheur.

Tante Maud ne peut contenir son émotion. Mathilda abandonne son livre pour la serrer dans ses bras.

Maud
(voix déformée par les larmes) Tu es la plus belle chose qui nous soit jamais arrivée à John et moi.

Mathilda
(souriant) Et dans quel état je vous suis arrivée! J’avais pris plein de mauvais plis à l’orphelinat.

Elle pose un doux baiser sur la joue de sa tante.

Mathilda
Je t’aime… Maman.